Dans son roman Notre-Dame de Paris paru en 1831, Victor Hugo prophétisa la mort prochaine de l’architecture. La multiplication des gazettes, journaux et revues scientifiques, la croissance exponentielle des livres publiés, les nouvelles technologies de reproduction de l’image – tout cela déplaçait le savoir des hommes vers un nouveau médium : la feuille imprimée. Aux yeux de Hugo, cette accumulation d’imprimés constituait en soi un édifice virtuel, qui remplacerait inévitablement le monument d’architecture : « Ceci tuera cela. Le livre tuera l’édifice. »
Deux siècles plus tard, il est sans doute temps de remettre en question la thèse de Hugo. Car aujourd’hui, c’est par d’autres moyens – canaux d’information en continu, agrégateurs de nouvelles, sites de partage de vidéos et de photos, fils RSS – que l’événement est diffusé. Et de plus de plus, c’est aussi par d’autres moyens – wikis, archives en ligne – que les savoirs accumulés sont conservés et diffusés. D’un point de vue contemporain, c’est donc bien le livre qui semble menacé d’extinction, et non l’architecture.
Du coup, comment présenter, faire connaître, et rendre hommage à la parole écrite? C’est la question que pose le projet d’une Maison de la littérature à Québec. Conçu et piloté par l’Institut Canadien – un organisme sans but lucratif qui assure la gestion et l’animation de la plupart des bibliothèques de la ville de Québec – ce projet fera l’objet d’un concours d’architecture au cours de 2010.
Le site retenu pour la future Maison de la littérature est une ancienne église néo-gothique de la rue Saint-Stanislas, à l’intérieur des murailles de la vieille haute ville de Québec. Trapu et austère, cerné de contreforts, couronné de clochetons, surélevé de la rue par un vaste emmarchement en pierre, l’ancien temple méthodiste Wesleyen (bâti en 1849-50) ne sert depuis longtemps plus au culte.
Pour l’Institut Canadien, la Maison de la littérature doit devenir « un point d’ancrage important du milieu littéraire, un lieu de rencontre entre les lecteurs et les créateurs, une vitrine de la littérature québécoise… » . Ni tout à fait bibliothèque, ni tout à fait musée, la Maison de la littérature propose un programme complexe et hybride, axé sur la création, la diffusion et la collection.
À l’image du programme fonctionnel, l’atelier propose une démarche formelle axée sur l’idée de l’hybride. Comme fil conducteur, chaque étudiant(e) s’appuiera sur un récit : conte, roman ou film fantastique. Dans la littérature fantastique, l’être hybride (Quasimodo, Frankenstein, Dr Jekyll) est un être sans identité claire, composé d’éléments dépareillés ou même contradictoires; mais il est néanmoins doté d’une vie artificielle et mystérieuse.
