Nous remercions les personnes suivantes qui ont contribué au succès de l’atelier :
CONFÉRENCIERS
DOCUMENTATION ET VISITE DE L’HÔTEL-DIEU
CRITIQUES INVITÉS
La conservation repose sur une réflexion théorique qui tend aujourd’hui à transmettre l’importance de la reconnaissance de la société. Elle rejoint en cela un phénomène de plus en plus répandu de la démocratie participative qui, dans le milieu de l’aménagement, est reflété à Montréal par l’importance des consultations publiques, parfois même en amont des projets. Bien que certains puissent avoir la nostalgie d’une modernité où l’architecte avait le pouvoir de décider le monde, le rôle et l’éthique des professionnels de l’aménagement changent. Le projet doit viser la pertinence urbaine pour être socialement acceptable.
Depuis quelques années, tant au niveau international que national, le patrimoine est abordé sous l’angle des valeurs qui peuvent être associées à un bien. Cette approche tient compte des développements dans les sciences humaines selon lesquels la réalité est représentée à travers des constructions sociales individuelles ou collectives. Il n’y a donc pas d’absolu mais des valeurs relatives que l’on ne peut analyser que suivant une démarche qualitative pour les connaître, les comprendre et, dans une volonté d’agir, déterminer celles qui méritent d’être retenues parce que plus pertinentes et consensuelles. Par le fait même, cette approche implique que le patrimoine n’a de la valeur que si la population lui en accorde. Elle reconnait aussi qu’un projet de conservation est éminemment politique, au sens le plus noble du terme. Ainsi, le patrimoine, parfois présenté comme une contrainte qui limite le travail de conception, doit plutôt être vu comme une ouverture sur un espace de création responsable des architectes.
La Ville de Montréal a adopté cette approche des valeurs. Le document, qui sera fourni en atelier, intitulé «L’évaluation de l’intérêt patrimonial d’un lieu : guide d’application du processus menant à la formulation d’un énoncé d’intérêt patrimonial – notions, principes et boîte à outil» explique la méthode d’analyse; les valeurs qui peuvent être associées à un lieu patrimonial; les recommandations à l’égard du projet à réaliser, etc.
La construction des grands hôpitaux montréalais, celui du CUSM et celui du CHUM ainsi que la décroissance des communautés religieuses font en sorte que le sort réservé aux grands hôpitaux et institutions qui se trouvent à l’intérieur du site patrimonial déclaré du Mont-Royal ont fait l’actualité au cours des derniers mois. Des groupes populaires se mobilisent.1 Un comité formé par le gouvernement du Québec vient d’être mis en place pour planifier leur avenir. Pourtant, dès les années 1990, l’avenir de ces institutions était déjà connu.
L’Hôtel-Dieu a été fondé par Jeanne Mance, aujourd’hui reconnue comme un des deux fondatrices de Montréal. Il était alors installé sur la rue Saint-Paul, au cœur du Vieux-Montréal. L’architecte Victor Bourgeau conçoit l’édifice sur une répartition semblable des fonctions principales, à savoir l’aile des sœurs et l’aile des patients, séparés au centre par la chapelle. Un orphelinat a été prévu à l’arrière mais cet élément de programme a été laissé sans suite.
De nombreux édifices ont été ajoutés par la suite correspondant non seulement aux besoins croissant de l’institution mais également aux progrès de la médecine. Pour la plupart, il témoigne d’un modernisme sensible à l’esprit classique qui a dominé l’architecture traditionnelle.
Outre l’intérêt actuel que l’on porte sur ce site, celui-ci comporte des potentiels pour le développement d’un projet.
Rapport avec le paysage
Au XIXe siècle, le choix de ce site sur l’avenue des Pins s’expliquait par trois raisons principales.
Cette situation aux confins du développement urbain et aux abords des parcs Jeanne-Mance et Mont-Royal caractérisent la présence urbaine de l’ensemble.
Le mur d’enceinte
L’Hôtel-Dieu abrite le couvent des sœurs hospitalières et il s’inscrivait dans une longue tradition qui voulait que les propriétés conventuelles soient limitées par un mur d’enceinte. Ainsi, bien qu’il soit aux abords de la ville et du parc, le site de l’Hôtel-Dieu est isolé de ceux-ci par le mur. Même à l’intérieur de l’enceinte, le terrain comprend un secteur distinct, celui des sœurs, marqué par un agréable jardin traditionnel. Par opposition, la partie consacrée à l’hôpital a nécessité la multiplication des aires de stationnement et de nombreux agrandissements qui ont fait perdre la qualité des espaces extérieurs.
En quelque sorte, l’hôpital est une institution métropolitaine, donc nécessairement publique mais il est en même temps coupé du reste de la ville, par ce mur dans un premier temps et par la logique de développement qui lui est propre.
De nos jours, avec raisons, les «gate communities» ont mauvaise réputation. Elles contribuent fortement dans différents pays, même aux Etats-Unis à créer des effets de rupture dans la ville, tant au niveau social qu’au niveau de la trame urbaine. En 1972, Rem Koolhaas dans son projet Exodus or the Voluntary prisoners of Architecture, qui s’inscrivait dans une réflexion plus générale sur le mur de Berlin, avait imaginé un lieu urbain entièrement muré, où les prisonniers volontaires pouvaient créer par la fermeture de l’espace un nouveau lieu de liberté et de gouvernance. D’une certaine manière, les communautés religieuses se fondaient sur une idée semblable lorsqu’elles se retrouvaient dans ces lieux volontairement fermés du reste de la ville.
Par sa fermeture partielle du reste de la ville et son ouverture nécessaire par la fonction, le site donne à réfléchir sur un programme qui permet un regroupement social qui se développer sur ces avantages. Du point de vue de l’aménagement de l’ensemble, comment tirer profit des qualités tout en évitant le piège des «gate communities»?
Ce résumé des intérêts architecturaux, urbains et historiques permet d’envisager des pistes de réflexion pour le projet.